04 May
04May

Aujourd’hui, Pierre se retrouve avec un petit groupe de disciples, dont Thomas que nous avons rencontré dimanche dernier. Ensemble, ils partent à la pêche, signe que nos compagnons de mauvaise fortune se demandent encore ce qu’ils doivent faire maintenant que Jésus est parti. Doivent-ils tourner la page et reprendre leur vie d’avant? Leur nuit de pêche n’a rien donné, comme s’il était impossible de reprendre leur ancienne vie. Lorsqu’on a connu et suivi Jésus, quelque chose a changé qui ne peut être défait. C’est lorsque les disciples réalisent que sans Jésus leur cœur aussi bien que leurs filets sont vides que le ressuscité se manifeste.

Bien sûr que les disciples doivent fournir un effort pour reconnaître le Christ. Sa résurrection l’a transformé. Les évangiles ne se soucient pas de dire comment, mais on sait que les disciples ne le reconnaissent plus immédiatement à son physique. Il peut également aller et venir, et se tenir au milieu d’eux, même lorsque les portes sont closes. Par ailleurs, sa parole conserve la même autorité sur les disciples et la même efficacité sur les éléments.

L’expérience des disciples est aussi la nôtre. Lorsque nous ressentons un vide que rien ne semble pouvoir remplir, nous réalisons que sans Jésus nous n’avons rien. Il nous interpelle : «Jetez le filet à droite de la barque, et vous trouverez»! «Je vous ai un jour appelé à me suivre et votre vie a changé, pourquoi en serait-il autrement aujourd’hui? Ouvrez vos yeux! Ouvrez vos cœurs! Je suis ressuscité et vivrai toujours avec vous: vous serez mes témoins!»

Car cette nouvelle présence n’est pas faite pour être retenue ou enfermée. Elle doit s’étendre aux autres, au monde entier. Les 153 poissons représentent l’entièreté du monde connu à l’époque. L’événement Jésus et sa résurrection auraient pu rester un incident local et sans envergure dans la Palestine d’hier. Mais sa dimension est universelle et encore actuelle: c’est du salut du monde dont il est question. Chaque homme, chaque femme, chaque enfant, d’hier, d’aujourd’hui et de demain, est appelé à entendre cette invitation gratuite et à y répondre librement. Dans notre marche pascale, on voit déjà poindre la Pentecôte…

Illustration: «La pêche miraculeuse des poissons» John Reilly (1928-2010), Huile sur toile, peinte en 1978 © John Reilly artiste

John Reilly (1928-2010) est un artiste britannique (potier, orfèvre et peintre) qui a produit des œuvres à la fois stylisées et expressionnistes, issues de son christianisme fervent. Il a étudié au Kingston College of Art, de 1949 à 1952. Certaines de ses créations sont conservées par la Methodist Church Collection, le Leicestershire County Council Education Department et la Findhorn Foundation.

Plusieurs des œuvres de Reilly se déploient autour d’un cercle central. Ici, c’est un soleil d'où émanent des plaquettes de couleur, formant comme des ondulations à la surface de l'eau. Elles évoquent les vagues de la mer de Tibériade où se déroule l’évangile de ce matin. L’effet est remarquable. D’abord, il y a cette impression de vitrail, illuminé par un soleil lointain qui éclaire l’œuvre comme par-derrière. Puis, il y a cette vision tunnel qui nous oriente vers la source de lumière dont on soupçonne l’origine divine. Elle éclaire les éléments de la composition: les disciples à gauche, avec leur barque, puis le Christ à droite, avec les poissons qui le traversent avant de se diriger vers les disciples. 

La composition globale est constituée de fragments kaléidoscopiques qui forment le motif général du tableau. Les cercles relient le Christ à droite, avec les apôtres à gauche, avec leur barque, en passant par le soleil et les poissons. Les poissons, qui composent la plus grande partie de l'œuvre, ne font pas seulement rendre la composition intéressante, mais ils constituent la représentation corporelle des apôtres et du Christ. Peut-on y voir l'Église qui rend présent le Christ et perpétue le témoignage des apôtres? Leur forme se déploie également afin de compléter le cercle. Y a-t-il ici un symbolisme qui renvoie aux membres de l’Église présente et vivante, à la base du cercle, et ceux qui sont déjà en Dieu ou qui viendront après eux, en haut? Extraordinaire image de l’Église ou de ce qu’on appelle dans le Credo la communion des saints.

Dans la tradition biblique, les poissons occupent une place de choix. Ici, les poissons représentent les personnes qui doivent encore être «ramenées à terre» pour recevoir le «souffle de vie » et rencontrer le Christ, représenté debout sur le rivage. La lecture d'aujourd'hui nous dit que les disciples ont pêché 153 poissons. Les exégètes n’ont pas chômé en calculant que le nombre 153 est le total de tous les nombres de 1 à 17. 1+2+3....+16+17=153! En symbolique biblique, le nombre 17 est également le nombre premier symbolique représentant le Messie. Certains auteurs affirment qu'au moment où Jean a écrit son Évangile, il y avait 153 nations connues. Autant d’indices pour rappeler que le Christ est venu pour racheter tous les humains. Comme le Seigneur ressuscité le fait dans le passage d'aujourd'hui, l’Église est appelée à se tenir sur le rivage, au quai de toutes les périphéries, pour annoncer la bonne nouvelle du salut offerte gratuitement en Jésus-Christ.

Joyeuses Pâques, au cœur du jubilé de l’espérance!

Claude Pigeon, prêtre

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