15 Jun
15Jun

«L’Esprit reçoit ce qui vient de moi pour vous le faire connaître» (Jn 16, 12-15).

Dans l’évangile de ce dimanche, nous entendons Jésus dire à ses disciples: «J’ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais pour l’instant vous ne pouvez pas les porter. Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous conduira dans la vérité tout entière ».

Autrefois, on utilisait des images pour parler de la Trinité aux enfants: un triangle, un trèfle, un arbre avec trois branches. Une fois que l'on a compris l'exemple avec sa raison, on n’est pas beaucoup plus avancés. La Trinité est un mystère dans lequel il faut entrer avec le cœur beaucoup plus qu'avec la raison. N’est-ce pas le travail mystique que réalisent en nous la méditation et la prière appuyée sur une icône? C’est ce que je vous propose en cette mystérieuse fête de la Trinité!

Illustration: «Icône de la Trinité», Andreï Roublev, peinte entre 1422 et 1427 et aujourd’hui conservée à la cathédrale du Christ-Sauveur de Moscou.

L’icône que je vous propose ce matin est aussi connue sous le nom d’«Hospitalité d’Abraham». Elle nous montre trois personnages assis autour d’une table. La scène s’inspire de la visite des trois «anges» au chêne de Mambré, lorsque l'Éternel vient annoncer à Abraham et Sarah qu'ils auront un fils, malgré leur âge avancé (Gn 18). Roublev fait abstraction d’Abraham et Sarah pour se concentrer sur les divins visiteurs. Absents, Abraham et Sarah deviennent avec nous des observateurs de la scène. 

Dans l’Ancien Testament, la figure de l’ange est souvent utilisée pour renvoyer à Dieu lui-même. Il s’agit donc ici d’une représentation symbolique de la Trinité: le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Leur tête est nimbée d’or, rappelant leur nature divine. Ils sont jeunes, allusion à l’éternelle jeunesse de Dieu. Ils sont semblables, car ils symbolisent la Trinité, la triple incarnation du Dieu unique. Pour exprimer l'unité existant entre les trois anges, Roublev compose son icône dans un cercle dont la circonférence passe par le milieu de chacun des nimbes et dont le centre est la main gauche du personnage central.

On notera la perspective qui fait en sorte qu’il n’y a pas de profondeur, ce sont plutôt les personnages s’avancent vers nous pour venir à notre rencontre.

Le Père est à gauche, vêtu d’un manteau presque transparent sur une tunique bleu ciel, symbolisant sa nature divine invisible. Une maison au-dessus de lui évoque la «maison du Père».

Le Fils, le Sauveur, est assis au centre et regarde vers le Père. Il a les caractéristiques du Pantocrator. Il porte un vêtement rouge opaque (chair, sang et humanité), recouvert d’un manteau bleu (ciel et divinité). La coupe rouge devant lui contient le dessin d'un agneau symbolisant le sacrifice dans l’Ancien Testament et annonçant celui du Christ et l’eucharistie, ce qui explique aussi le geste de bénédiction au-dessus de la coupe. L’arbre derrière lui représente l’arbre de vie (Gn 3, 9) et la croix. Notez comment il penche vers la gauche, vers la Maison du Père…

L’Esprit-Saint, à droite, regarde vers les deux autres. Il porte un vêtement vert (espérance et vie qui sont des dons apportés par l’Esprit) et bleu (nature divine). Une vague lumineuse au-dessus de lui évoque la force et la puissance divine, c'est-à-dire ici le Paraclet promit par Jésus, mais également l’Eau vive, autre symbole important de l’Esprit.

Le trône ou la table de l’offrande sert de siège unique aux trois personnages. Dans l’A.T., l’autel symbolise la présence de Dieu. Dans le N.T., il accueille l’offrande du Christ, offerte au Père par la puissance de l’Esprit. Remarquez aussi que les contours extérieurs des personnages de gauche et de droite dessinent un calice, avec le Christ au centre, offert…

Les trois personnages forment un cercle, signe d’unité et d’amour parfait. Dans cette unité de l’Amour, chacun ne regarde que l’autre, ne vit que pour l’autre, le plus grand est le plus petit… En effet, le Père n’est pas en position centrale, mais sur le côté, tout comme l’Esprit-Saint… Le Christ au centre avec l’Esprit-Saint à droite ne cessent de regarder le Père à gauche et de dire ainsi, par leur seul regard, que c’est avant tout Lui qui compte. Sans le Père, le Fils et l’Esprit-Saint ne sont rien et ils ne peuvent rien…

Enfin, l’espace vide à l’avant de cette merveilleuse icône écrite par Roublev invite le priant ou le chercheur de Dieu que nous sommes à entrer dans cette communion divine. Ce n’est pas l’artiste qui lance cette invitation, ce sont les personnages eux-mêmes, la Trinité, qui nous invite à entrer dans son mystère en la laissant faire chez nous sa demeure…

Bonne fête de la Sainte Trinité!

Claude Pigeon, prêtre

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