«Celui qui ne renconce pas à tout ce qui lui appartient ne peut pas être mon disciple.» (Lc 14, 25-33)
Aujourd’hui, Jésus s’adresse à une foule nombreuse, mais au lieu de la flatter, il la provoque : «Celui qui ne renonce pas à tout ce qui lui appartient ne peut pas être mon disciple». Il parle de préférer Dieu à tout, même aux liens familiaux, et invite à réfléchir avant de s’engager, comme un bâtisseur ou un roi en guerre. Être disciple semble vouloir dire ne pas suivre à moitié!
En effet, choisir, c’est renoncer! Suivre le Christ, ce n’est pas l’ajouter à notre vie comme une option spirituelle. C’est le mettre au centre de sa vie. Voilà qui change tout. Cela implique de renoncer à certaines sécurités, à des habitudes bien ancrées, à des attachements qui nous éloignent de l’essentiel. Cette semaine, je peux me poser la question: qu’est-ce que je mets avant Dieu sans m’en rendre compte? Si je décidais de lui offrir seulement une heure au cours de la semaine, mais bien réelle, concrète? Je ferais quoi?
Choisir le Christ, c’est aussi construire avec lucidité! La foi n’est pas un coup de cœur passager. Elle se bâtit comme une maison solide: avec des fondations, des choix réfléchis, une fidélité dans les petits gestes. Cette semaine, je peux demander si je décidais de bâtir ma vie spirituelle comme je planifie mes projets professionnels, à quoi cela ressemblerait-il? Cela peut commencer très simplement: faire un signe de croix en me réveillant, prier le matin, appeler une personne seule, lire un verset biblique ou d’un auteur spirituel que j’apprécie… autant de gestes qui peuvent devenir une pierre vivante dans mon édifice intérieur.
Renoncer pour mieux recevoir! Renoncer n’est pas perdre. C’est faire de la place. Nous sommes souvent encombrés, non seulement par ce que nous possédons, mais aussi par nos peurs, nos jugements, nos blessures. Le Christ nous invite à lâcher ce qui nous enferme pour accueillir ce qui libère. Cette semaine, si j’identifiais une chose à laisser aller: une rancune, une habitude, une parole retenue. Vivons ce choix comme la création d’un espace vide que Dieu pourra remplir de son amour et de sa grâce.
Illustration: «Renoncement» (2017), Huile sur toile de lin par Monique-Laurence Jury. L'œuvre fait partie d’une série intitulée: «Les arbres témoins du monde».
Monique-Laurence Jury est une artiste peintre contemporaine française, initiée dès l’enfance au dessin, à la peinture et à la sculpture dans l’atelier de son arrière-grand-père sculpteur. Après des études en graphisme et une formation artistique approfondie, elle développe une œuvre singulière, à la croisée de l’abstraction, de la symbolique spirituelle et de la recherche intérieure.
Son travail repose sur trois axes. D’abord, elle se consacre à l’exploration de la condition humaine, le silence, le dépouillement, la mémoire et la verticalité. Ensuite, son esthétique privilégie les formes épurées, les textures subtiles et les contrastes doux. Enfin, sa technique consiste à composer ses toiles numériquement avant de les projeter et de les peindre à l’huile sur toile de lin, avec une grande maîtrise du couteau et de la lumière.
L’œuvre que je vous propose aujourd’hui présente une structure verticale, minimale, presque méditative. Aucun personnage, aucun décor chargé: juste une forme centrale, comme un tronc ou une colonne, qui s’élève dans un espace nu. L’absence de détails invite au silence. Le regard est attiré vers le haut, comme une ascension intérieure.
Les tons sont sobres: gris, beige, brun, avec des nuances de lumière qui traversent la toile sans l’envahir. Rien d’éclatant, mais tout est habité. Cette palette évoque le dépouillement, la paix, la sobriété du cœur qui se détache.
L’artiste donne la clé d’interprétation de l’œuvre dans son titre: «Renoncement». Ce n’est pas une œuvre triste, mais une œuvre libre. Elle parle du choix de lâcher, de se dépouiller, de ne pas remplir l’espace inutilement. Le centre est vide, mais ce vide est habité par une présence pleine et entière. On pourrait y voir le lieu où Dieu peut venir habiter en nous.
Cette toile devient alors une parabole visuelle de l’Évangile de ce dimanche. Elle incarne le choix de mettre Dieu au centre, en laissant les autres attachements s’effacer. Elle évoque la construction lucide d’une vie intérieure, sans décor superflu. Elle manifeste le renoncement fécond, celui qui ne détruit pas, mais qui libère.
Cette œuvre ne cherche pas à séduire par l’abondance, mais à interpeller par la sobriété et le dépouillement. Comme Jésus qui s’adresse à la foule et ne leur propose ni confort ni facilité, mais un chemin exigeant: «Celui qui ne renonce pas à tout ce qui lui appartient ne peut pas être mon disciple».
Par cette œuvre, Monique-Laurence Jury montre que le dépouillement n’est pas une perte, mais une ouverture. Le centre vide devient un lieu de passage obligé pour l'être humain qui veut grandir. C’est ce même appel que Jésus adresse à chacun : faire de la place pour Dieu, choisir de bâtir avec lucidité, et renoncer à ce qui encombre pour mieux recevoir ce qui élève.
Bon jubilé de l’espérance!
Claude